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Au revoir MITM, bonjour Miss

La lutte contre les pénuries va se concentrer sur certains médicaments jugés plus essentiels que les autres.

© FOTOLIA/OLIVIERLEMOAL

Après les médicaments d'intérêt thérapeutique majeur (MITM), va-t-on voir arriver une liste des « super MITM » ? Depuis janvier 2017, les industriels du médicament sont en effet tenus, pour certaines spécialités, de mettre en place des plans de gestion de pénurie (PGP), en liaison avec les autorités. Ces MITM représentent aujourd'hui pas moins de 40 % de la pharmacopée française. Un chiffre trop élevé, selon les industriels. En effet, à l'occasion de son discours de vœux pour 2019, l'actuel président du Leem, Philippe Tcheng, a souhaité « proposer un plan d’actions coconstruit et partagé pour réduire les ruptures d’approvisionnement des médicaments les plus indispensables ». Ils ont même un nom : les médicaments d'intérêt sanitaire et stratégique (Miss). Thomas Borel, directeur des affaires scientifiques du Leem, estime que ces Miss représenteraient 10 à 15 % de la pharmacopée : « Sur 200 molécules anticancéreuses, de 35 à 50 pourraient être jugées comme Miss », estime-t-il. 

Juger les Miss

L'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) évoquait déjà il y a quelques mois « une surveillance de la couverture des besoins en certains MITM à haut risque » mise en place en collaboration avec les laboratoires, sans qu'une liste ait été dévoilée. « On pourra en trouver dans toutes les grandes classes thérapeutiques, de nombreux critères doivent être pris en compte : la présence d'une forme pédiatrique ou réservée à l’hôpital, leur importance dans le pronostic vital... », précise Thomas Borel. Reste à savoir comment faire exactement, la responsabilité de ces ruptures étant régulièrement rejetée par les industriels sur les grossistes-répartiteurs et inversement. « La question de la prévention des ruptures [...] est un sujet absolument prioritaire qui relève de la responsabilité [...] de l’ensemble des acteurs de la chaîne », a précisé Philippe Tcheng. Il serait en cela plus ambitieux que les plans de gestion des pénuries... sans toutefois révolutionner le système, puisqu'il « améliorera l'existant ». La balle est aujourd'hui dans le camp des autorités sanitaires et du gouvernement, le dossier naviguant entre le ministère de la Santé et celui de l'Économie et des Finances.

Les patients impatients

France Assos Santé, collectif représentant 85 associations de patients, n'en peut plus d'attendre. D'après un sondage qu'il a commandé à l'institut BVA, « 25 % des répondants se sont en effet déjà vus refuser la délivrance d’un médicament ou d’un vaccin pour cause de pénurie. Ce taux monte à 31 % pour les personnes atteintes par une affection de longue durée (ALD) ». Ces pénuries semblent particulièrement sensibles sur les vaccins et les médicaments antihypertenseurs, à écouter les patients. Pour l'ANSM, « les trois aires les plus touchées sont les anti-infectieux, les médicaments du système nerveux et les médicaments antinéoplasiques ». France Assos Santé ne mâche pas ses mots en pointant d'ailleurs directement le rôle desdits industriels dans ces ruptures, qui seraient, selon eux et les patients interrogés, « très largement responsables de ces pénuries, principalement dues à des stratégies financières contestables ». Conscient des dommages considérables de ces pénuries sur leur réputation – dont le rétablissement est également un des chantiers du président du Leem –, les industriels arriveront-ils une bonne fois pour toutes à s'en débarrasser ? 

Par Laurent Simon

17 Janvier 2019

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