Le Subutex (buprénorphine) n'échappe toujours pas à la malédiction des mésusages. Un communiqué de l'Académie de médecine, paru le 2 juillet dernier, est venu rappeler qu'il faisait l'objet d'un trafic « dont les organismes payeurs font les frais », estimés à « 250 millions d'euros par an ». « Plus grave », note l'institution, ce produit, dissous dans l'eau, est souvent utilisé en injection intraveineuse, une pratique « à l'origine de 30 à 40 décès » chaque année en France.
Partant de ces constats déjà connus, l'Académie recommande, primo, « d'insister auprès des médecins et professionnels de santé pour que [...] la méthadone soit prescrite en première intention ». Secundo, elle propose de privilégier les génériques du Subutex, « plus difficilement injectables ». Tertio, elle recommande de généraliser le recours à la Suboxone. En effet, la présence dans ce princeps de naloxone, associée à la buprénorphine, prévient l'effet « shoot » recherché par l'injection de buprénorphine seule. Des propositions consensuelles ? Pas vraiment.
Un argumentaire démonté
Pour MG Addictions, il s'agit rien moins que d'une « approche obscurantiste », révélant « une méconnaissance navrante du sujet, des erreurs factuelles graves et une approche partisane très éloignée de la rigueur scientifique dont [l'Académie] devrait se prévaloir », fustige le pôle Médecine générale de Fédération Addiction. Ce dernier répond point par point aux propos de l'Académie. Il relève ainsi qu'à l'heure actuelle, la méthadone « ne peut être primo-prescrite qu'en centre de soins spécialisés ou dans un établissement de santé, ce qui en limite l'accès », et que la buprénorphine haut dosage générique est « tout aussi injectable que sa forme princeps ». Par ailleurs, Fédération Addiction note que l'amélioration du service médical rendu (ASMR) accordée à la Suboxone est faible, ce qui n'en fait « en rien une alternative à l'injection ». Ils ne vont pas être faciles à réconcilier.