À l'issue d'un point presse qui s'est tenu cet après-midi à Rennes en présence de Marisol Touraine, ministre de la Santé, on en sait plus sur ce qui s'est passé au cours de l'essai clinique mené à Rennes par la société Biotrial.
- Quelle est la molécule mise en cause ?
Il s'agit d'un produit visant à « traiter les troubles de l'humeur de l'anxiété », précise le ministère, en augmentant le taux de cannabinoïdes endogènes. Ses indications précises ne sont pas connues. Son nom est le BIA 10-2474 ; elle appartient à la société portugaise Bial, qui a chargé la société prestataire Biotrial basée à Rennes, spécialisée dans les essais cliniques pour le compte d'industriels, de la tester en phase 1. Il ne s'agit pas d'un « dérivé du cannabis » – le produit n'en contient d'ailleurs pas – mais bien d'un inhibiteur enzymatique.
- Qui sont les victimes et quelle est la gravité de leurs atteintes ?
Six personnes – des volontaires sains âgés de 28 à 49 ans rémunérés pour cet essai – sont aujourd'hui hospitalisées au Centre hospitalier universitaire de Rennes (CHU) avec des symptômes plus ou moins graves. Une personne est en état de mort cérébrale, quatre sont sévèrement touchées mais à des degrés divers, la dernière est sous surveillance. S'il existe des lésions « nécrotiques et thrombotiques » visibles à l'imagerie médicale chez certaines personnes, elles ne seront pas nécessairement handicapées, a précisé le Pr Gilles Edan, chef du pôle Neurosciences au CHU de Rennes. Toutes faisaient partie de la même cohorte de patients qui a reçu la dose la plus élevée de BIA 10-2474 dans le protocole établi, qui comportait en plus deux patients sous placebo. Au total, 90 personnes se sont vues administrer cette molécule à des doses variables, selon le ministère de la Santé.
- Quelle est la chronologie des événements ?
Biotrial a demandé l'autorisation pour cet essai clinique en avril dernier, laquelle lui a été accordée le 26 juin 2015. L'essai clinique a débuté le 9 juillet chez Biotrial. « Ces personnes auraient commencé à prendre le médicament le jeudi 7 janvier. Des premiers symptômes seraient apparus le dimanche 10 janvier sur une première personne. Les 5 autres ont été hospitalisées progressivement depuis », précise le ministère de la Santé. L'essai clinique a été interrompu le 11 janvier. Le ministère dit avoir été informé de ce drame le jeudi 14 janvier.
- Quelles suites seront données à cet incident ?
Trois procédures sont d'ores et déjà connues : le ministère de la Santé a missionné l'Inspection générale des affaires sociales (Igas), qui doit remettre ses premières conclusions fin janvier et un rapport définitif fin mars. Une enquête est également menée par l'Agence nationale de sécurité des médicaments (ANSM). En outre, deux procédures judiciaires ont été lancées par le parquet de Rennes et le pôle de Santé publique du parquet de Paris.