Cette fois c'est la bonne ! « Longtemps attendu, maintes fois annoncé, maintes fois repoussé », comme l'a rappelé Agnès Buzyn, la ministre de la Santé, lors de la conférence de présentation de ce qui restera comme l'un des plus longs serpents de mer de la santé publique française, le DMP voit enfin le jour après quatorze années d'une gestation pour le moins compliquée. Désormais généralisé à l'ensemble du territoire après une phase d'expérimentation déployée avec succès durant un an et demi dans neuf départements, ce nouvel espace numérique de santé se présente, pour la ministre, comme « une réponse efficace à une anomalie constatée depuis longtemps, qui est que les Français ne disposent pas de l'historique de leur dossier médical ».
De son côté, Nicolas Revel, le directeur général de l'Assurance maladie à qui a été confiée la reprise en main du dossier il y a trois ans, considère que l'une des conditions de la réussite de cette mouture finale est d'avoir permis la création de nouveaux canaux d'ouverture des DMP autres que celui des médecins dont le temps médical est compté : « Aujourd'hui, on peut aussi [ouvrir un DMP] soi-même [sur le site internet créé à cet effet, NDLR], dans les accueils des caisses primaires d'assurance maladie (CPAM), dans sa pharmacie et bientôt avec l'aide de son infirmier. »
Et le DP dans tout ça ?
Alors qu'on ne comptabilisait que 500 000 ouvertures de DMP entre 2004 et 2016, dont « la moitié était vide » selon Nicolas Revel, ce sont aujourd'hui plus de 1,8 million de Français qui disposent de ce carnet de santé numérique. L'objectif fixé à l'Assurance maladie par le ministère de 40 millions de DMP ouverts d'ici à 2022 semble réaliste au vu de la dynamique actuelle dont les pharmaciens d'officine sont le fer de lance. Cent nouvelles pharmacies par jour viennent renforcer les 8 000 d’entre elles qui offrent déjà la possibilité d'ouvrir un DMP à leurs patients. Rien que la dernière semaine d'octobre, le réseau officinal a permis de créer la moitié environ des 80 000 nouveaux dossiers enregistrés. Le directeur de l'Assurance maladie n'a d'ailleurs pas hésité à « remercier très sincèrement les pharmaciens de leur engagement » tout en soulignant à quel point cette campagne, qui bénéficiera dès le 9 novembre d'une vaste couverture médiatique, avait « besoin de la puissance de leur réseau ».
Quant au dossier pharmaceutique (DP), Nicolas Revel a assuré qu'il viendrait très prochainement et comme prévu alimenter le DMP. Bien que les quatre mois d'historique de délivrance qu'il stocke puissent sembler redondants, voire inutiles, par rapport aux deux années des données de l'Assurance maladie directement injectées dans chaque DMP ouvert, le fait qu'il puisse également apporter des informations vis-à-vis du non-remboursable lui permet de conserver toute sa légitimité si toutefois l'alimentation du DP en OTC devient plus systématique. Si les pharmaciens peuvent donc d'ores et déjà créer des DMP, reste à intégrer dans leurs logiciels la possibilité de les consulter et de les renseigner, ce qui est encore loin d'être le cas, contrairement aux logiciels des médecins qui sont désormais compatibles avec le DMP à près de 70 %.