Formulaire de recherche

La dispensation adaptée l'est-elle vraiment ?

Dans la foulée de l’avenant n° 19, les syndicats d’officinaux et l’Assurance maladie négocient les modalités de mise en place de la dispensation adaptée. Mais de nombreuses questions restent en suspens.

© adobestock_viktor88

L’avenant n° 19 signé le 19 novembre par l’Uspo et l’Assurance maladie prévoit une baisse des honoraires pour les ordonnances complexes et la suppression de la rémunération sur objectifs de santé publique (Rosp) RPPS. Soit une perte de rémunération pour le réseau de 70 millions d’euros. Ce qui avait provoqué de nombreux remous au sein de la profession.

Une mission pas nouvelle

Parmi les mesures envisagées par les signataires en contrepartie, figure la dispensation adaptée. Celle-ci « se définit comme une dispensation efficiente renforçant le bon usage, l’observance, la lutte contre le gaspillage et la diminution du risque iatrogénique », indique l’Assurance maladie. Elle précise : « Dans le plus complet respect de la prescription médicale, et uniquement pour les traitements à posologie variable, le pharmacien peut adapter la dispensation aux besoins du patient, ceux-ci pouvant varier pendant la durée de prescription. » En pratique, lorsque le médecin inscrit, par exemple, « paracétamol 500 mg, 1 comprimé toutes les 6 heures si douleur », il s’agit pour le pharmacien de délivrer la quantité de boîtes correspondant le mieux aux nécessités du malade et non pas la quantité maximale. Et il touchera pour cela une  Rosp. « L’idée de récompenser le travail du pharmacien est intéressante, même si on adapte déjà la dispensation aux besoins du patient », souligne Philippe Besset, qui a participé aux séances de négociations. Mais pour le président de la FSPF, c’est surtout le volet économique qui laisse à désirer.

Une usine à gaz

« Nous allons tracer cet acte à la ligne ou à la boîte, ce n’est pas encore tranché », explique Philippe Besset. De son côté, l’Assurance maladie va déterminer l’évolution naturelle du nombre de boîtes pour chacune des classes thérapeutiques qui seront retenues (antiacides non associés, laxatifs osmotiques, larmes artificielles, antirhumatismaux non stéroïdiens non associés…), sur la base des volumes remboursés en 2018 et 2019. Si en 2020, l'évolution du nombre de boîtes vendues dans une classe se situe en-dessous de l’évolution naturelle, alors le pharmacien pourra prétendre au versement d’une Rosp sur la base des économies ainsi générées. Mais pas sur la totalité, car l’Assurance maladie va ensuite estimer la part de l’action du pharmacien dans la décroissance des volumes enregistrés et appliquer un coefficient de correction. « Une usine à gaz », résume Philippe Besset. Il fait également remarquer qu’un officinal qui réalise déjà ce travail auprès de ses patients ne bénéficiera de cette prime que si les confrères qui ne le faisaient pas auparavant s’y engagent maintenant. Et de prédire que cette Rosp ne fera pas de vieux os, car « si tout le monde entre dans le dispositif en 2020, ce que l’on peut espérer, dès 2021 il n’y aura plus d’économies à se partager ». « C’est un piège absolu », tranche-t-il. Pour le président de la FSPF, cette nouvelle mission a été simplement imaginée dans la précipitation pour tenter de faire avaler la pilule de l’avenant n° 19 aux confrères et n'a pas été suffisamment préparée. La prochaine réunion de négociation prévue mardi 17 décembre permettra peut-être de corriger le tir.

Par Christophe Micas

13 Décembre 2019

© Le Pharmacien de France - 2024 - Tous droits réservés