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Le libre choix au cœur des débats

Sur fond d'économies drastiques, les acteurs du marché de la LPP, pharmaciens en tête, ont réaffirmé l'importance de laisser le patient choisir librement son prestataire.

De gauche à droite : Julien Arnaud (présentateur), Jocelyne Wittevrongel (FSPF), André Tanti (CEPS), Gérard Raymond (France Assos Santé), Philippe Vermersch (SML) Fabrice Camaioni (FSPF) et Alexandra Duvauchelle (Fedepsad). © SEBASTIAN SCHEFFEL

 

« Nous sommes devant un vrai paradoxe, a posé d’emblée Jocelyne Wittevrongel, vice-présidente de la FSPF chargée de l’Exercice professionnel, le maintien à domicile se développe de plus en plus [il a en effet progressé de 6 % cette année encore, NDLR]. Mais en parallèle, […] le PLFSS [projet de loi de financement de la sécurité sociale, NDLR] 2019 prévoit 150 millions d’économies sur les dispositifs médicaux. Nous subissons des injonctions contradictoires ! » Et Fabrice Camaioni, président de l’Union nationale des prestataires de dispositifs médicaux (UNPDM), de prévenir : « Je ne sais pas comment on fera [ces 150 millions d'euros d’économies], c’est impensable. » Une situation que ne nie pas André Tanti, vice-président en charge des dispositifs médicaux au sein du Comité économique des produits de santé (CEPS, mais qu'il relativise. Selon lui, le développement de stents et autres dispositifs médicaux (DM) utilisés en chirurgie a permis de réduire les dépenses tout en améliorant la prise en charge des patients : des opérations moins coûteuses globalement, grâce à un produit inscrit à la liste des produits et prestations (LPP). Sauf que ces économies n’ont pas été prises en compte par la Sécurité sociale : seule l'est l’augmentation des dépenses en produits de santé. Il reconnaît par ailleurs le manque de précision de la nomenclature de la LPP, entraînant parfois des dérives : « Le remboursement de la compression est effectif pour toutes les pathologies mais pas sûr que ce soit à la Sécurité sociale de payer pour la prévention au travail… »

Concurrence acharnée

Des dérives, il y en a d’autres, régulièrement pointées par les pharmaciens victimes de la concurrence féroce des prestataires. Fabrice Camaioni l’affirme : il n’est pas rare qu’« un patient qui sort de l’hôpital reçoi[ve] des DM envoyés par un acteur qu’il ne connaît pas. Deux principes fondamentaux sont bafoués : la propriété de l’ordonnance […] et le libre choix du fournisseur. Cette concurrence-là me gêne terriblement ». La mainmise des prestataires sur les sorties hospitalières est difficile à combattre : les pharmaciens sont interdits de contact direct avec les prescripteurs sous peine de se voir reprocher un compérage. « Il est temps de mettre fin aux pratiques des prestataires dans les services hospitaliers […], c'est du détournement de prescription, voire de l'achat de prescription », assène Jocelyne Wittevrongel, sous les applaudissements du public. Philippe Vermersch, président du Syndicat des médecins libéraux (SML), enfonce le clou : « Des patients signent des contrats de prestation à l’hôpital alors qu’ils sont en état de faiblesse. » Il cite également le cas d’un hôpital ayant signé « avec des prestataires un contrat d'hospitalisation à domicile pour vingt patients par jour : il y a bien une concurrence déloyale. »

Négociations au cordeau

Pas facile pour Alexandra Duvauchelle, déléguée générale de la Fédération des prestataires de santé à domicile (Fedepsad) de faire entendre sa voix. Pour elle, « les prestataires sont également attachés au libre choix du patient » et « nous devons aujourd'hui mener ensemble un combat contre les baisses de prix ». Tous les acteurs s’accordent en tout cas sur l’importance de continuer à construire l’avenir de la LPP... avec des régulations. C’est ainsi que les tire-laits sont actuellement dans le viseur du CEPS, avec pour objectif leur délivrance sans reste à charge pour la patiente. La LPP est donc vouée à évoluer, tout en respectant les valeurs essentielles que sont le libre choix du patient, une meilleure prise en charge et une concurrence loyale entre les acteurs. Tout cela sans parler de l'achat ou de la location par Internet de certains DM, qui se fait souvent sans aucun contact humain ni conseil associé de la part d'un pharmacien ou d'un prestataire. De quoi alimenter d'autres débats à venir.

Par Alexandra Chopard

21 Octobre 2018

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