Lors d'une conférence de presse qu’il a tenue le samedi 28 mars pour expliquer la stratégie du gouvernement durant la crise du coronavirus, le Premier ministre, Édouard Philippe, a prévenu que « les quinze premiers jours d'avril seront encore plus difficiles que les quinze jours qui viennent de s'écouler ». C’est le cas notamment en Île-de-France, région désormais la plus sévèrement touchée par l’épidémie, avec le Grand Est. Dans l’un des départements du sud de la banlieue parisienne, dans l’Essonne, la titulaire de la pharmacie de la Gribelette à Morsang-sur-Orge, Virginie Buisson, explique avoir vu passer la semaine dernière dans son officine une dizaine de personnes par jour présentant les symptômes du Covid-19. Deux de ses patients sont déjà décédés des suites d’une infection à ce virus. « Nous avons pris conscience très rapidement de la situation qui nous attendait à partir des informations nous parvenant du Grand Est et nous avons anticipé », indique l'officinale, également présidente du syndicat des pharmaciens de l’Essonne. À l’initiative de la vice-présidente du syndicat départemental, Marianne Lechertier, des appareils de mesure de la saturation en oxygène ont été rapidement achetés afin notamment d’équiper les infirmiers de l’association Espace Vie qui chapeaute les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) d’une partie du département. Des appareils ont également été fournis aux médecins, infirmiers, mais aussi aux pharmacies du secteur.
Un appel à la solidarité
Le syndicat s’est procuré de grandes quantités de solution hydroalcoolique pour approvisionner les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), les foyers d’handicapés, les cabinets médicaux et tous les professionnels essentiels à la vie du pays. « Nous avons aussi proposé aux pharmaciens du département de réorganiser leurs espaces de vente avec une régulation de l’entrée des patients dans l’officine », explique Virginie Buisson. Parmi les mesures préconisées, le retrait des présentoirs des comptoirs afin d’y placer les lecteurs de carte Vitale du côté des patients, l’installation d’obstacles pour faire respecter la distance de sécurité sanitaire lors de la délivrance des ordonnances et la mise en place, au niveau des postes de travail, d’hygiaphones achetés auprès d’une entreprise locale. Afin d’assurer la continuité des soins tout en soulageant les officines, le service de garde démarre désormais à 19 h, au lieu de 20 h. Face à l’insuffisance de masques de protection pour les auxiliaires de vie dans le département, les membres du syndicat de l’Essonne ont fait appel à la solidarité auprès des commerçants qui ne pouvaient poursuivre leur activité. « Les esthéticiennes, les coiffeurs, les peintres en bâtiment nous ont apporté du matériel de protection », raconte Virginie Buisson. Les maires ont également été sollicités pour fournir masques, charlottes, blouses, pantalons utilisés habituellement dans les restaurants scolaires.
Des équipes courageuses
Dans son officine, la titulaire a réaménagé ses horaires d’ouverture, même si l’activité est encore soutenue. Elle ferme désormais une demi-heure plus tôt le soir pour passer ses commandes mais aussi pour nettoyer et désinfecter son officine hors de la présence des patients. Pour les mêmes raisons, mais aussi pour faire les livraisons à domicile, elle a également allongé la pause méridienne d’une demi-heure.
Quoi qu’il en soit, tout n’a pas été rose dans cette préparation pour faire face à l’épidémie. La deuxième livraison de masques tant attendue n’est jamais arrivée dans toutes les officines, le transporteur Géodis ayant été victime de vols. Mais dans cette période difficile, la motivation de son équipe lui met du baume au cœur : « Je suis impressionnée par leur mobilisation et leur courage face à cette crise sanitaire. Personne ne compte ni son temps ni son énergie. »