Ce que les connaisseurs appellent les objectifs régionaux de dépenses d'assurance maladie (Ordam), déclinaisons régionales de l'Ondam (Objectif national de dépenses d'assurance maladie), refont régulièrement surface. D'abord proposés puis écartés de la loi Bachelot en 2009, ils avaient resurgi au détour du projet de loi de financement de la sécurité sociale en 2011, puis d'une proposition de loi déposée en 2012. Les deux fois, en vain ; confier la gestion des dépenses de santé aux agences régionales de santé (ARS) est en effet loin de faire l'unanimité. Mais voilà que l'ARS Bretagne a présenté le 27 octobre, lors d'une conférence de presse, un bilan de ses dépenses de santé sur l'année 2014. Co-signé par l'Assurance maladie, le document montre une évolution des dépenses en-deçà du niveau national : + 2,6 % contre + 3 % pour l'ensemble de la France. Dans le détail, la région se réjouit également de la maîtrise des dépenses de soins de ville, en augmentation de 3,4 % par rapport à 2013 – contre 4,1 % au niveau national – et, parmi les soins de ville, de la progression des dépenses liées aux produits de santé, à hauteur de 3,8 % contre 5 % au national. Le tout « malgré un contexte démographiquement défavorable : 10,1 % des Bretons ont 75 ans et plus pour seulement 9,1 % en France ».
Un joli tableau qui a « stupéfait » le Centre national des professions de santé, présidé par Philippe Gaertner. Dans un communiqué, le CNPS s'étonne de cette « initiative [qui] laisse à penser que les Ordam sont en place, bien qu'ils n'existent pas dans la loi ». Il y voit une « preuve [...] de la réalité de la démarche d'étatisation du système de soins à partir des régions ». Et rappelle « que les libéraux de santé sont unanimement opposés à [cette] étatisation [...] et au démantèlement des conventions nationales des professions ». En effet, les détracteurs des Ordam posent la question de la gestion nationale des dépenses de soins par l'Assurance maladie, donc du rôle des conventions signées avec les professionnels de santé, comme la convention pharmaceutique. Une nouvelle volonté de « maîtrise comptable » perçue en tout cas comme « un très mauvais signal à la veille de l'adoption du projet de loi de santé ».