Enfin ! D’abord annoncé pour le 1er décembre dernier, puis pour l’été, l’autotest du VIH aura finalement débarqué dans les officines le 15 septembre. Une révolution en matière de dépistage, à laquelle s’opposaient encore il y a quelques années institutions et acteurs de la lutte contre le sida. Mais le visage de l’épidémie a changé et le fabricant AAZ a surmonté un à un les obstacles réglementaires à sa commercialisation.
Écueils multiples
Après avoir obtenu son marquage CE au mois d’avril, cette PME française a signé un partenariat avec le laboratoire Mylan qui le distribuera en exclusivité. Surtout, elle a finalement conclu un accord de collecte avec l’éco-organisme Dastri, qui assurait pourtant il y a quelques mois que l’autotest du VIH « ne rentr[ait] pas dans son périmètre d’un point de vue juridique ». Qu’à cela ne tienne, la direction générale de la santé a décidé que l’autopiqueur, une fois utilisé, devait être collecté selon les mêmes modalités que les déchets d’activité de soins à risques infectieux (Dasri) perforants. À chaque vente, l’équipe officinale remettra donc au patient un collecteur adapté, pour l’instant le plus petit disponible (1 litre), Dastri s’étant engagé à élaborer, pour la fin de l’année 2016, des conteneurs plus adaptés. L’Autotest VIH est en tout cas prêt à s’attaquer aux 30 000 personnes vivant sans le savoir avec le virus en France. Mais le pourra-t-il ? Son prix est l’un des premiers écueils soulignés par les associations. Libre, il est conseillé entre 25 et 28 euros TTC. Un tarif élevé, d’autant plus que le dépistage est majoritairement gratuit en France. Certes, il vient répondre aux besoins des patients qui ne veulent pas ou ne souhaitent plus fréquenter les hôpitaux, les centres de dépistage ou les associations mais, sachant que ces 30 000 séropositifs qui s’ignorent sont des homosexuels masculins pour un tiers, des personnes originaires d’Afrique subsaharienne pour l’autre tiers et des hétérosexuels nés en France pour le dernier tiers, difficile d’imaginer que les migrants, les personnes en situation précaire ou les moins bien informées, par exemple, pourront ainsi être atteints.
Le prix est le premier
écueil à l’accessibilité
de cet autotest.
Ajoutez une notice d’utilisation complète mais longue, assez complexe et uniquement disponible en français et en anglais… Les organisateurs et participants ne s’y sont d’ailleurs pas trompés : le lancement de l’autotest a eu lieu au sein de la mairie du IVe arrondissement de Paris, composé de quartiers plutôt aisés, dont le Marais, haut lieu de la vie gay.
Cible unique
Au moins dans un premier temps, la population clairement visée est celle qui – homo ou hétéro –, consciente de prendre des risques, se fait dépister plusieurs fois dans l’année, à un rythme régulier. En d’autres termes, ces personnes se dépistent déjà mais seront ainsi plus autonomes et géreront mieux leur prévention. Pour les jeunes, pour les migrants, bref pour les autres, il va falloir attendre « le remboursement, un tarif social ou même la gratuité », réclamés notamment par Jean-Luc Romero-Michel, président de l’association Élus locaux contre le sida. À la veille du lancement de l’autotest, il s’en inquiétait dans un communiqué et n’a finalement pas assisté à la conférence. Comme une ombre au tableau.