Donald Trump affirme haut et fort prendre de l'hydroxychloroquine en prévention. L'aveu du président des États-Unis n'aura visiblement pas autant pesé sur la décision du ministre français de la Santé que la parution le 22 mai dans The Lancet d'une étude observationnelle menée sur près de 100 000 patients hospitalisés et testés positifs au SARS-CoV-2. Au vu de ses conclusions, Olivier Véran s'est fendu le 23 mai d'un tweet dans lequel il déclare que, suite à cette publication « alertant sur l'inefficacité et les risques de certains traitements du Covid-19 dont l'hydroxychloroquine », il a saisi le Haut Conseil de la santé publique « pour qu'il [...] analyse et [...] propose sous 48 heures une révision des règles dérogatoires de prescription » pour cette molécule. L'analyse des données de 96 032 patients hospitalisés entre le 20 décembre 2019 et le 14 avril 2020 dans 671 hôpitaux répartis sur 6 continents suggère en effet que l'administration de chloroquine ou d'hydroxychloroquine, avec ou sans antibiotique (azithromycine ou clarithromycine), à des patients reconnus positifs au SARS-CoV-2 est associée à un surrisque significatif de décès à l'hôpital ainsi qu'à une augmentation de la fréquence d'arythmies ventriculaires par rapport à l'absence de prise de ce type de traitements.
La faute au big data
Le chef de fil des tenants de l'efficacité du traitement associant l'hydroxychloroquine et l'azithromycine, le désormais célèbre professeur Didier Raoult, n'a évidemment pas tardé à réagir, lui aussi sur Twitter. Pour le microbiologiste, si « les dernières études publiées sur l'hydroxychloroquine montrent une discordance entre les données observationnelles et les analyses rétrospectives de bases de dossiers de patients », c'est parce qu'à l'Institut hospitalo-universitaire (IHU) Méditerranée, « nous faisons confiance à la réalité, pas au big data mal maîtrisé ». S'il fustige ainsi des études réalisées « auprès de bases de données et pas auprès de malades », il n'en reste pas moins que son association thérapeutique n'a pour l'heure pas réussi à fournir de preuves suffisantes de son efficacité selon les critères exigés par les grandes publications scientifiques à comité de relecture. Il y a donc désormais fort à parier que cette dernière étude va conduire à d'importantes restrictions dans la prescription du protocole élaboré le 30 mars par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) suite au décret du 25 mars autorisant notamment que l'hydroxychloroquine puisse être prescrite, dispensée et administrée « sous la responsabilité d'un médecin aux patients atteints par le Covid-19, dans les établissements de santé qui les prennent en charge, ainsi que pour la poursuite de leur traitement, si leur état le permet et sur autorisation du prescripteur initial, à domicile ».