Pas simple de résumer six mois de réunions de travail en quelques mots. Toujours est-il que mardi dernier, en sortant de la réunion multilatérale, Philippe Besset a reconnu que les propositions de l’Assurance maladie sont intéressantes. « C’est tout de même la première fois, dans l’histoire des négociations conventionnelles, que nous obtenons un avenant qui ne contient que des éléments positifs pour la profession. Le problème, c’est que l’investissement global n’atteint pas le montant nécessaire au réseau », explique le président de la FSPF.
Pour parvenir à cette conclusion, le syndicat s’appuie sur les tableaux de la part de financement de l’assurance maladie dans le réseau officinal. « En 2019, la rémunération de la profession s’est élevée à 6,8 milliards d’euros. La demande de la FSPF, qui correspond au mandat que mon conseil d’administration m’a donné, est d’avoir 1 milliard d’euros de plus, soit 7,8 milliards d’euros, en 2025, 2026 et 2027. » Selon les projections de la Cnam, en intégrant ses dernières propositions, cette rémunération serait de 7,5 milliards d’euros en 2025, 7,7 milliards d’euros en 2026 et 7,9 milliards en 2027. Impossible donc pour Philippe Besset de signer l’avenant en l’état. Pourtant, tout n'est pas à jeter, loin de là.
Les points d’accord
• N'ayant pas le pouvoir de décision sur le sujet, la Cnam soutient fermement la revendication de la profession en faveur d’une substitution biosimilaire la plus large possible, d’un arrêté d’égalisation de marge entre biologique d’origine et biosimilaire, de remises pour les biosimilaires et les hybrides comme pour les génériques ainsi que la possibilité d’intégrer les biosimilaires et hybrides dans la Rosp génériques.
• Les entretiens pharmaceutiques et les bilans partagés de médication (BPM) passent en paiement à l'acte, et un entretien court opioïdes (5 euros) est créé.
• La Cnam débloque une enveloppe de 20 millions d’euros pour les officines en territoires fragiles, à raison d’un maximum de 20 000 euros par an (à la main des commissions paritaires locales) par pharmacie concernée.
• Un observatoire prévisionnel du réseau officinal va être mis en place.
• Les Trod angine et cystite sont revalorisés de 6 à 10 euros (+ 40 %) et un acte de dispensation protocolisée (Trod positif en accès direct suivi de la délivrance d’un antibiotique) à 15 euros voit le jour.
• Dès que les bonnes pratiques seront publiées, la création d’un modèle économique pour la préparation des doses à administrer (PDA) sera mise à l’ordre du jour d’une commission paritaire nationale.
• La Rosp pour les messageries sécurisées de santé vont intégrer l’équipement d’une boîte aux lettres organisationnelle pour l’officine.
• Une Rosp exceptionnelle est mise en place pour 2024 avec paiement début 2025, afin de compenser partiellement le retard pris par les négociations. Pour la réalisation d’au moins une vaccination ou un Trod angine/cystite, le versement sera de 200 euros. Pour tout accompagnement pharmaceutique (BPM, entretiens courts ou longs) : 250 euros. Enfin une Rosp de 100 euros sera versée aux officines qui augmenteront d’au moins 10 % le nombre de kits de dépistage du cancer colorectal distribués.
• L’engagement dans une démarche écoresponsable s’appuyant sur différents critères permettra le versement d’une Rosp de 100 euros.
Si la FSPF se félicite des avancées obtenues, il n'en manque pas moins quelques millions de financement.
Les marges d'amélioration
• La Cnam propose une revalorisation des honoraires à l’ordonnance (HDR) de 0,05 euro au 1er janvier 2025 et potentiellement de 0,06 euro au 1er janvier 2027, ainsi que la revalorisation des honoraires liés à l’âge (HDA) de 0,09 euro au 1er janvier 2026. Une clause de revoyure mi-2026 permettra, si besoin d’adapter ces montants.
• Elle propose également une revalorisation des gardes de 2 euros.
• Elle imagine la création d’une Rosp de 3 euros par prescription de vaccin par le pharmacien, dès lors que le taux de prescriptions de vaccins est supérieur de 5 % à celui de l’ensemble des vaccinations réalisées à l’officine en 2024, supérieur de 15 % en 2025 et supérieur de 25 % en 2026.
Dans ce cadre, et avec le mandat unanime obtenu en conseil d’administration mercredi 15 mai, Philippe Besset a présenté une contre-proposition à l’Assurance maladie le jour même : « Le directeur général en a accusé réception et indiqué un retour en début de semaine prochaine. » Une rencontre avec la conseillère santé du Premier ministre étant programmée jeudi 23 mai pour les deux syndicats, la FSPF tiendra un conseil d’administration extraordinaire le lendemain pour soumettre le retour de la Cnam et les éléments abordés avec le cabinet de Gabriel Attal. L’appel à la grève du 30 mai pourrait-il être levé ? C’est peu probable puisque les négociations conventionnelles ne sont pas le seul sujet ayant mené à la mobilisation de la profession (voir ici).
En tout état de cause, précise Philippe Besset, la dernière proposition de l’Assurance maladie sera présentée lors de l’assemblée générale de la FSPF le 7 juin prochain. Charge aux élus de décider d’une signature de l’avenant conventionnel ou pas. « Ma préconisation sera probablement de signer car nous avons un certain nombre de confrères en grande difficulté en zone rurale et ne pas prendre les 20 000 euros proposés par la Cnam pourrait nous amener à perdre quelques dizaines ou centaines d’officines supplémentaires, s’inquiète le président. C’est une très lourde responsabilité. C’est dans ce contexte que je défends l’idée d’une signature de combat. »