Dans l'affaire du droit de substitution du pharmacien d'un médicament biologique par un biosimilaire, cela fait un moment que les officinaux ne savent plus sur quel pied danser. D'abord autorisé, dans le seul cas de l'initiation de traitement, par un article de la loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) pour 2014, la substitution à l'officine n'a jamais pu être appliquée en raison d'un décret d'application n'ayant jamais vu le jour. Des amendements demandant la publication de ce décret ont bien fleuri au fil des derniers projets de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), mais sans succès. Le coup de grâce est finalement venu de la LFSS pour 2020 qui supprime, purement et simplement, le droit de substitution des biosimilaires par les pharmaciens. Fin de partie ? Peut-être pas.
Pas d'arguments scientifiques solides
Les professionnels et industriels français du médicament générique et du médicament biosimilaire représentés au sein du Gemme ont bien tenté d'infléchir la tendance, mais ils n'ont pas non plus réussi à convaincre le législateur. Si leur intérêt économique à ce que cette mesure soit adoptée n'a pas forcément joué en la faveur de cette dernière, la toute récente position de l'Académie nationale de pharmacie pourrait avoir plus de poids. Dans un communiqué en date du 18 novembre, elle estime ainsi « qu'il n'existe pas d'arguments scientifiques solides pour contester le droit de substitution par le pharmacien d'officine » dans deux cas précis : en initiation de traitement et « quand il est possible de substituer un médicament biologique par un "bio-identique", à savoir un médicament biosimilaire dont le principe actif et le produit fini sont issus de la même chaîne de fabrication que le produit de référence ».
Pour une liste positive
Relevant qu'aucun cas d'immunogénicité n'a pour le moment été documenté dans la littérature, les académiciens considèrent « qu'il pourrait y avoir substitution par le pharmacien d'officine également en cours de traitement pour certaines classes de médicaments biologiques ». Il s'agit notamment des insulines, des héparines de bas poids moléculaire (HBPM) et des facteurs de stimulation des granulocytes (G-CSF) non glycolysés. L'Académie recommande ainsi que les autorités sanitaires « dressent une liste positive des médicaments biologiques (princeps et biosimilaires) autorisés à substitution (hors primo-dispensation et autobiosimilaires) par le pharmacien d'officine » et définit un cadre dans lequel pourrait se réaliser cette substitution en pharmacie. Elle estime ainsi que le prescripteur devrait évidemment être informé d'une substitution, mais a posteriori, via le Dossier médical partagé (DMP) ou le Dossier pharmaceutique (DP). Elle préconise enfin que les patients concernés reçoivent une information sur les biosimilaires et une explication sur la substitution proposée par leur pharmacien. Les résultats d'une enquête réalisée par l'Observatoire national des médicaments biosimilaires, révélés le 19 novembre, montrent en effet que 50,7 % des patients concernés disent ne pas connaître les biosimilaires et que 32 % avouent ne pas savoir s'ils sont sous traitement biosimilaire ou biomédicament de référence.