N°1368
Mars 2025

Chaud devant !

Canicules récurrentes, débats sur la chaleur du sang des dinosaures, découvertes sur la température du cerveau humain… Cet été, la science prend un sacré coup de chaud !

par Hélène Bry
Le 04 juillet 2022
  • 🇺🇸 États-Unis

    27 façons de mourir de chaud

    Des chercheurs de l’Université d’Hawaï (États-Unis) ont effectué une revue systématique de la littérature médicale sur la façon dont la chaleur tue. Dans un article publié dans Circulation de l’American Heart Association fin 2017, ils ont identifié 5 mécanismes physiologiques ayant des répercussions sur 7 organes vitaux et trouvé des preuves de décès pour 27 des 35 interactions possibles. Toutes résultent de l’ischémie et de la cytotoxicité thermique susceptibles d’avoir un impact sur le fonctionnement du cerveau, des reins, du foie et des intestins. Mais au-delà, l’ensemble des réponses physiologiques à ces deux agressions expose à un risque de décès encore plus grand. Par exemple, la rupture de la muqueuse intestinale due à l’agression chimique de l’ischémie et thermique de la cytotoxicité peut conduire à la libération du contenu de l’intestin dans la circulation sanguine, provoquant un troisième mécanisme : la réponse inflammatoire systémique. Les protéines contrôlant l’obstruction du sang peuvent alors devenir hyperactives et provoquer des caillots susceptibles de couper l’apport sanguin au cerveau, aux reins, au foie et aux poumons : c’est la coagulation intravasculaire disséminée. Et le cercle infernal risque de se terminer en hémorragie mortelle, même sans blessure. « Mourir pendant une vague de chaleur, c’est comme un film d’horreur avec 27 mauvaises fins au choix », résume Camilo Mora, l’auteur principal. « Il est incroyable que l’humanité dans son ensemble fasse preuve d’une telle complaisance face aux menaces que pose le changement climatique en cours. »

  • 🇺🇸 États-Unis

    Dinos à sang chaud

    Une étude dirigée par des chercheurs de Yale (États-Unis) et publiée dans Science Advances en février 2020, en vient à la conclusion que les dinosaures auraient eu…le sang chaud ! La question était pourtant loin d’être tranchée concernant ces énormes créatures qui, sur l’échelle de l’évolution, se situent quelque part entre les oiseaux (au sang chaud) et les reptiles (au sang froid). Or, les auteurs estiment que « tous les principaux dinosaures présentaient des températures corporelles plus élevées que leur environnement ». Comment ont-ils réussi à trancher un sujet aussi brûlant ? En étudiant la chimie des coquilles d’œufs de dinosaures fossilisées. Ainsi, le Maiasaura, gros herbivore à l’allure bien connue, « était capable d’élever métaboliquement sa température corporelle de 3 à 15° C au-dessus des températures extérieures ». Les échantillons de Troodon, eux, étaient jusqu’à 10 degrés plus chauds que leur environnement, et ceux de Megaloolithus, de 3 à 6 ° C de plus. Des découvertes qui montrent que « la capacité d’élever métaboliquement leur température au-dessus de l’environnement était un trait précoce et évolué pour les dinosaures » et pourraient contribuer au débat en cours sur le rôle des plumes dans l’évolution des premiers oiseaux. Un plumage dense aurait ainsi pu être d’abord sélectionné pour l’isolation, avant de servir à l’affichage sexuel et au vol.

  • 🇺🇸 États-Unis

    Recul sur la canicule

    Alors que les météorologues s’accordent à dire que les prévisions ne sont réellement fiables que sur 4 ou 5 jours et que des tendances peuvent être dégagées sur un intervalle de 10 à 15 jours, une équipe de chercheurs de la National Oceanic and Atmospheric Administration (États-Unis) a publié en juillet 2022 dans Journal of Climate une étude très instructive sur les dernières avancées en matière de prévisions des canicules sur le continent Nord-américain. Après avoir scruté à la loupe les vagues de chaleur survenues dans cette région du monde entre 1992 et 2019, ils s’estiment capables d’anticiper les canicules 9 mois à l’avance en se basant sur trois paramètres qui, s’ils sont analysés dès le mois de septembre, permettent de déterminer le risque de voir arriver des températures au-dessus des normes de saison l’été suivant. Ces trois facteurs sont la température de surface des océans Pacifique Nord et Atlantique Nord (qui influent sur la chaleur et l’humidité au centre des États-Unis), la survenue ou pas du phénomène climatique « El Niño » et le forçage radioactif, soit l’équilibre entre le rayonnement solaire entrant et les rayons infrarouges sortants.

  • 🇬🇧 Royaume-Uni

    Cerveau en ébullition

    Garder la tête froide ne serait pas le meilleur moyen de bien faire marcher son cerveau. C’est ce que démontre une surprenante étude publiée par des chercheurs de Cambridge (Royaume-Uni) le 13 juin 2022 dans Brain. En travaillant sur les moyens de prédire la survie après une lésion cérébrale, ils ont établi, par une méthode non invasive, de véritables cartes météo du ciboulot de 40 personnes en parfaite santé, de 20 à 40 ans, recrutées pour comparer leurs résultats avec ceux de patients porteurs de lésions cérébrales traumatiques. Elles ont passé des scanners le matin, l’après-midi et en fin de soirée. Verdict : alors que leur température buccale était d’environ 36° C, celle de leur cerveau variait de 36,1° C à 40,9° C, soit une moyenne de 38,5° C. « Le résultat le plus surprenant est que le cerveau humain sain peut atteindre des températures qui seraient diagnostiquées comme de la fièvre n’importe où ailleurs dans le corps », commente John S. O’Neill, qui a dirigé cette recherche. Des variations de température ont été constatées en fonction de l’heure de la journée, de la région du cerveau explorée, du sexe et de l’âge. Globalement, plus la zone du cerveau est profonde, plus elle est chaude, avec un maximum observé dans le thalamus. Par ailleurs, le mercure pouvait frôler les 41° C chez les femmes en postovulation. L’étude révèle enfin que c’est précisément la variation de la température cérébrale au cours de la journée qui est prédictive de la survie chez les personnes au cerveau lésé.

  • 🇮🇳 Inde

    Inde incandescente

    Mars 2022 a été le plus chaud répertorié en Inde et au Pakistan depuis 122 ans, avec des températures affolantes enregistrées pendant un temps record de 2 mois. Le climax climatique a été relevé à Jacobabad (Pakistan), le 14 mai, avec un mercure affichant 51° C ! L’organisme World Weather Attribution, qui analyse si un phénomène météo extrême a été causé ou aggravé par le réchauffement, estime – alors que la canicule indienne s’éternisait – que le changement climatique induit par l’homme a augmenté d’un facteur 30 la probabilité que survienne dans ces contrées un événement de chaleur précoce extrême tel que celui du printemps 2022. Il explique que « le même événement aurait été environ 1° C plus frais dans un climat préindustriel [et que] des vagues de chaleur comme celle-ci deviendront encore plus fréquentes et plus chaudes. Dans le scénario de température moyenne mondiale de + 2° C (actuellement à 1,2° C), une telle vague de chaleur deviendrait 2 à 20 fois plus probable, avec des températures de 0,5 à 1,5° C plus chaudes qu’en 2022. » Indécent !

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