N°1368
Mars 2025

L’hibernation protège des thromboses : info ou intox ?

On sait qu’une immobilisation, après une fracture par exemple, augmente le risque de thrombose. Mais quid des ours qui hibernent ?

© Canva - Pixabay - NakNakNak
par Hélène Bry
Le 03 novembre 2023
Plu­sieurs mois sans bou­ger en at­ten­dant le prin­temps. Et pour­tant, les ours en hi­ber­na­tion ne font guère de throm­boses, alors qu’elles sur­viennent par­fois lors­qu’ils sont ac­tifs, comme l’ont ré­vélé les au­top­sies ana­ly­sées par des cher­cheurs al­le­mands dans la re­vue Science du 13 avril 2023. Tan­dis que chez d’autres es­pèces hi­ber­nantes les pla­quettes sont sé­ques­trées dans les or­ganes à l’abri du froid, elles conti­nuent de cir­cu­ler en quan­tité ré­duite (avec donc un risque po­ten­tiel de throm­bose main­tenu) chez ce plan­ti­grade. De même, la ma­chi­ne­rie thrombo-in­flam­ma­toire des ours étant com­pa­rable à celle des hu­mains, les scien­ti­fiques ont ef­fec­tué des pré­lè­ve­ments san­guins chez 13 spé­ci­mens en hi­ber­na­tion en Suède, puis chez les mêmes, bien ré­veillés, au prin­temps. Constat : la pre­mière phase de l’hé­mo­stase est mo­di­fiée du­rant l’hi­ber­na­tion. En temps nor­mal, le vais­seau lésé se contracte et les pla­quettes forment un « clou pla­quet­taire » col­ma­tant la brèche. Mais lors de l’hi­ber­na­tion, les pla­quettes, moins sen­sibles au col­la­gène ou à la throm­bine, s’agrègent moins.

En­quête mo­lé­cu­laire

Ce phé­no­mène s’ex­plique à l’échelle mo­lé­cu­laire : 151 des pro­téines ex­pri­mées par les pla­quettes des ours ne le sont pas dans la même quan­tité en hi­ver et au prin­temps. Sur­tout HSP47, pro­duite 55 fois moins en hi­ber­na­tion. En contexte phy­sio­lo­gique, elle par­ti­cipe au dé­clen­che­ment de la throm­boi-nflam­ma­tion en fa­ci­li­tant la liai­son de la throm­bine à la sur­face des pla­quettes et l’ac­ti­va­tion des neu­tro­philes. Ainsi, chez les sou­ris trans­gé­niques n’ex­pri­mant plus HSP47, la for­ma­tion de caillots est presque in­hi­bée. Les au­teurs ont mon­tré que cette pro­téine est sous-ex­pri­mée aussi par les pla­quettes des pa­tients pré­sen­tant une lé­sion mé­dul­laire. Chez eux comme chez l’ours lé­thar­gique, l’ac­ti­va­tion des neu­tro­philes par les pla­quettes est di­mi­nuée. Idem chez les pa­tients sains sou­mis à une im­mo­bi­li­sa­tion de 27 jours pour une si­mu­la­tion spa­tiale, ou chez des truies al­lai­tantes im­mo­biles 21 à 28 jours. Au ni­veau thé­ra­peu­tique, « ce mé­ca­nisme phy­sio­lo­gique de throm­bo­pro­tec­tion, qui né­ces­site un cer­tain dé­lai pour se mettre en place, pointe peut-être une nou­velle piste à ex­plo­rer », es­pèrent les au­teurs.

Partager ce contenu
À lire aussi
Le safran comme solution magique au TDAH ? Les belles promesses prospèrent sur fond d’approximation scientifique et d...
Il est communément admis que l’alcool s’évapore totalement à la cuisson. Qu’en est-il vraiment ?
Bienvenue sur le nouveau site du Pharmacien de France !

Vous êtes déjà abonné ?
Connectez-vous pour mettre à jour vos identifiants :

 

Vous n’êtes pas encore abonné ?
Rejoignez-nous !