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Forte baisse de la délivrance de plusieurs spécialités

L'ANSM et l'Assurance maladie observent avec inquiétude un effondrement de la délivrance de certaines classes de produits de santé depuis le début du confinement.

© adobestock_rh2010

Une étude conjointe de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et de la Caisse nationale d'assurance maladie (Cnam) analyse depuis le début 2020 la vente de médicaments de prescription en officine. Les semaines 12 (du 16 au 22 mars) et 13 (du 23 au 29 mars), soit les deux premières semaines du confinement, ont ainsi été marquées par une très forte croissance des délivrances sur ordonnance en pharmacie de médicaments des maladies chroniques (pathologies cardio-vasculaires, diabète, troubles mentaux notamment). Une augmentation très supérieure à ce qui aurait été attendu en situation habituelle, de l'ordre de + 20 à + 40 % selon les classes thérapeutiques. Ce sont ainsi près de 600 000 personnes supplémentaires qui se sont rendues en pharmacie pour la délivrance d’un antihypertenseur en semaine 12 et 470 000 en semaine 13. Les chiffres atteignent respectivement 230 000 et 175 000 pour les antidiabétiques, et 270 000 et 220 000 pour les statines. La contraception orale a également fait l’objet d’une nette hausse (+ 45,3 % en semaine 12, soit + 140 000 patientes).

Les vaccins, les DIU et les produits
de diagnostic en chute libre

Suivant une dynamique strictement inverse, les médicaments dont l’administration nécessite le recours à un professionnel de santé ont vu leur délivrance fortement baisser durant ces deux semaines. C'est particulièrement net pour les vaccins (– 50 à – 70 % pour les vaccins anti-HPV, le ROR et les vaccins antitétaniques et – 23 % pour les vaccins penta/hexavalents des nourrissons en semaine 13), les DIU (stérilets) avec progestatif (– 10 % en semaine 12 et – 59 % en semaine 13) ainsi que les produits destinés aux actes diagnostiques médicaux (préparations pour coloscopie, produits iodés pour scanner, produits de contraste pour IRM) qui ont chuté de 20 % en semaine 12 et de 60 % en semaine 13.

+ 145 % pour l'hydroxychloroquine

Concernant les médicaments en lien avec le Covid-19, les délivrances de paracétamol ont été plus élevées qu’attendu dès février 2020 avec une augmentation d’un million et demi de personnes en semaines 12 et 13. En revanche, les délivrances d’anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) ont quant à eux connu une forte baisse en semaine 13 (– 60 %, soit 500 000 personnes). Un phénomène qui s'explique en grande partie par la chute des délivrances d’ibuprofène fortement suspecté d'avoir un effet péjoratif sur le pronostic d'une infection à SARS-CoV-2. Sans surprise, le nombre de personnes s'étant présentées avec une ordonnance pour se faire délivrer de la chloroquine/hydroxychloroquine a fortement augmenté (+ 21 % en semaine 10 puis + 70 % et + 145 % en semaines 12 et 13 pour l'hydroxychloroquine), particulièrement en Île-de-France et en Provence-Alpes-Côte d’Azur.

Crainte d'un retard dans la prise en charge

En conclusion de cette première phase de leur étude qui continue, l'ANSM et la Cnam s'inquiètent que le phénomène de « stockage » pour les traitements de pathologies chroniques ne suffise pas. Selon elles, « la possession de médicaments actifs en quantité suffisante ne veut néanmoins pas dire que les adaptations thérapeutiques fines des doses nécessaires pour certains traitements, comme l’insuline, les anticoagulants et les antihypertenseurs ont été réalisées ». Par ailleurs, la très forte diminution de la délivrance de vaccins laisse craindre un retard dans le calendrier vaccinal de nombreuses personnes, de même que la baisse de la délivrance des produits nécessaires aux examens permettant de diagnostiquer certains cancers ou autres maladies graves risque d'entraîner un retard de prise en charge, avec toutes les conséquences que cela suppose pour le pronostic.

Par Benoît Thelliez

22 Avril 2020

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