La loi renforçant la répression des violences commises à l’égard des professionnels de santé et donc des équipes officinales a été publiée ce jeudi 10 juillet au Journal officiel.
Née en janvier 2024 et portée à l’origine par l’ex-député Philippe Pradal (Horizons, Alpes-Maritimes), elle entrait dans le cadre du plan de lutte contre les violences faites aux soignants présenté, fin 2023, par la ministre de la Santé de l’époque, la pharmacienne Agnès Firmin-Le Bodo. Les travaux sur le projet de loi avaient été interrompus du fait de la dissolution de l’assemblée en 2024, mais grâce à la vigilance d’un regroupement de soignants constitué sous le nom de « Collectif du 12 mars » – soit la date de la Journée européenne de sensibilisation à la violence contre les médecins et les autres professions de santé –, ils n’ont pas été enterrés. La FSPF avait également soutenu activement l’importance de « renforcer la sanction pénale » et de permettre aux organisations professionnelles « de porter plainte aux côtés des soignants agressés ».
Le Parlement vient d’approuver définitivement le texte après l’adoption par les sénateurs, le 18 juin, puis par les députés le 25 juin, des conclusions de la commission mixte paritaire (CMP) via une procédure accélérée, un choix de l’exécutif pour répondre aux attentes pressantes de l’ensemble de la communauté des professionnels de santé, à l’hôpital comme en ville.
Toute l’équipe protégée
Le périmètre des personnes protégées a été étendu : il comprend désormais tout professionnel de santé « ou personne exerçant au sein d’un établissement de santé, d’un centre de santé, d’une maison de santé, d’une maison de naissance, d’un cabinet d’exercice libéral d’une profession de santé, d’une officine de pharmacie, d’un prestataire de santé à domicile, d’un laboratoire de biologie médicale, d’un établissement ou d’un service social ou médico-social ». Cela signifie donc que tous les membres de l’équipe officinale, qu’ils soient pharmaciens, préparateurs ou encore rayonnistes, logisticiens, secrétaires ou vendeurs en parapharmacie, bénéficient de cette protection particulière.
Stop aux insultes
Le délit d’outrage, c’est-à-dire le fait de proférer des insultes ou des propos dégradants, était constitué lorsqu’il visait un agent du service public. À présent, cette violence verbale tombe également sous le coup de la loi si elle dirigée contre une personne travaillant en pharmacie ou toute structure médicale ou médico-sociale. En clair, tout membre d’une équipe officinale qui serait insulté dans le cadre de son travail (y compris au domicile du patient) peut porter plainte. L’agresseur risque une amende maximale de 7 500 euros et une peine allant jusqu’à 6 mois de prison.
Un dépôt de plainte facilité
Selon les témoignages recueillis sur le terrain, notamment dans le cadre de l’enquête nationale sur la sécurité à l’officine menée par la FSPF en mars dernier, beaucoup de soignants agressés renoncent à porter plainte pour cause de surcharge administrative, mais aussi parce qu’ils peuvent craindre des représailles. Le législateur a souhaité répondre à cette problématique. C’est ainsi que la loi introduit la possibilité, pour les victimes, de déléguer le dépôt de plainte à leur employeur, après recueil par écrit de leur consentement. Les Ordres auront également la faculté de se porter partie civile dans le cas d’un outrage (auparavant, cette possibilité n’était ouverte qu’en cas de menaces).
Concernant les professionnels libéraux que sont notamment les titulaires officinaux, les Ordres et les URPS pourront également s’en charger : un décret est attendu pour préciser les modalités de cette substitution.
Autre amélioration de la loi à relever : les libéraux qui engagent une procédure pourront désormais déclarer leur adresse professionnelle en lieu et place de celle de leur domicile dans la plainte, pour limiter les craintes relatives à des représailles.
D’autres réflexions à mener
Si l’ensemble des professionnels de santé se réjouissent de l’adoption de ce nouveau texte, des voix s’élèvent pour indiquer qu’une partie de la lassitude des soignants à porter plainte tient à l’absence ou la rareté des poursuites judiciaires lorsque ces violences sont pourtant signalées auprès des autorités. D’autres pointent également l’absence de traitement des causes de ces violences, notamment lorsqu’elles sont liées à des troubles psychiatriques, ainsi que la situation particulière des professionnels exerçant de façon isolée qui pourraient bénéficier de dispositifs d’alerte spécifiques.
