« Nous sommes satisfaits que l’amendement soit passé, mais nous restons prudents quant à la suite des opérations », résume Philippe Besset, président de la FSPF. Mardi 28 octobre au soir, la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale a voté à l’unanimité deux amendements identiques présentés par Françoise Buffet (Ensemble pour la République) et Josiane Corneloup (LR) parmi les 14 amendements issus de députés de tous les bords politiques ayant le même objectif : supprimer définitivement la baisse du plafond des remises génériques décidée par arrêté par le gouvernement Bayrou le 4 août dernier. Le but : protéger le réseau pharmaceutique qui perd actuellement 300 officines par an.
Le législateur reprend la main
Par ce vote en commission des Affaires sociales, les députés confortent donc le plafond des remises génériques à 40 %, l’étendent aux hybrides et aux médicaments soumis à un TFR, et fixent le plafond des remises biosimilaires à 20 %. Surtout, ils réinstaurent la détermination de ces plafonds par le législateur, comme c’était le cas avant 2014, et empêchent ainsi une décision unilatérale du pouvoir réglementaire comme cela s’est passé le 4 août dernier par le biais d’un arrêté ministériel. Enfin, ils missionnent le gouvernement d’une « étude sur le niveau des remises commerciales pratiquées, en lien avec l’Assurance maladie, afin d’en évaluer l’impact sur le marché des médicaments concernés, sans exclure la piste d’une transformation du modèle de rémunération de la substitution des médicaments génériques, hybrides et biosimilaires », peut-on lire dans l’exposé des motifs.
Marge d’incertitude
Lors de son Live hebdomadaire, Philippe Besset a rappelé la genèse de cet amendement rédigé par son syndicat en août dernier, proposé « à nos amis de l’Uspo, des collectifs de groupements et des étudiants » qui ont fait le choix de le soutenir début septembre. « C’était une époque où nous étions en guerre contre le gouvernement, notamment l’ancien Premier ministre, François Bayrou. Entre-temps, nous avons obtenu un protocole d’accord avec Sébastien Lecornu et nous sommes désormais dans une relation de confiance avec le Premier ministre. Mais les parlementaires ont été échaudés par la séquence, ils ont voulu reprendre la main et voter l’amendement qui établit les plafonds de remises à 40 % pour les génériques et hybrides et à 20 % pour les biosimilaires. »
Si l’amendement passe toutes les étapes de l’examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2026 jusqu’à son vote, les plafonds à 40 et 20 % entreront en vigueur le 1er janvier 2026. Par ailleurs, explique le président de la FSPF, les amendements votés en commission sur les projets de loi de finances (PLF) et PLFSS ne sont pas intégrés au texte et doivent donc être à nouveau présentés en séance plénière. S’il ne doute pas que ce sera bien le cas et que le cap de l’Assemblée nationale devrait être franchi, Philippe Besset n’omet pas les autres étapes du texte et « la marge d’incertitude » jusqu’au vote de la loi.
Une année de travail
Le sujet a d’ailleurs fait partie des nombreux dossiers abordés ce 28 octobre lors de la première rencontre officielle entre la FSPF et la nouvelle ministre de la Santé, Stéphanie Rist. De fait, l’amendement porté par la profession et voté en commission par les députés « chagrine le gouvernement », explique Philippe Besset. En effet, le protocole d’accord avec le Premier ministre Sébastien Lecornu a suspendu pour trois mois l’arrêté abaissant les plafonds de remises. En outre, il s’est engagé à prolonger cette suspension autant que nécessaire. « J’ai dit à la ministre : trois mois, ce n’est vraiment pas suffisant, mais si vous vous engagez, au banc de l’Assemblée nationale, à maintenir le dispositif jusqu’au 31 décembre 2026, nous aurons le temps de travailler, et nous nous donnons rendez-vous à l’examen du PLFSS de l’an prochain pour tirer les conclusions de l’ensemble des travaux. » Selon Philippe Besset, une année complète n’est en effet « ni trop ni trop peu » pour que l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) et l’inspection générale des finances (IGF) mènent à bien leur mission, à l’issue de laquelle des travaux de concertation seront nécessaires pour aboutir à des décisions qui devront ensuite se traduire par des textes législatifs, conventionnels et réglementaires.
Les autres mesures du PLFSS
Toujours lors de son Live hebdomadaire, le président de la FSPF a rapidement balayé les mesures du PLFSS concernant la profession, notant que les députés ont supprimé l’article élargissant le périmètre des franchises médicales et donc écarté leur récupération au comptoir. En revanche, souligne-t-il, le doublement des franchises – auquel la FSPF est fortement opposée – est toujours à l’ordre du jour puisque cette mesure ne nécessite pas de vecteur législatif, mais réglementaire. Philippe Besset note également que l’amendement du député Isaac-Sibille visant à interdire les groupements a été déclaré irrecevable. En revanche, l’article permettant la création d’une officine dans une commune de moins de 2 500 habitants ayant perdu sa dernière pharmacie a été maintenu. « Le rapporteur général compte revenir sur ce sujet en fonction des résultats de la mission IGF-Igas. » Enfin, ajoute Philippe Besset, un amendement visant à généraliser la dispensation à l’unité a été adopté ce vendredi 31 octobre. « Nous y sommes défavorables pour des raisons économiques, de praticité et de temps de travail pour les pharmaciens, ainsi que pour des raisons de sécurité sanitaire pour les patients. Là encore, le rapporteur Bazin et le président Valletoux attendent le rapport de la Cour des comptes qui doit être rendu dans les prochains jours à l’Assemblée nationale afin d’éclairer le débat. »
